Thaïlande, épisode 1

Chroniques des incommensurables riens

Après des mois passés dans une Asie bon marché, voilà que nous arrivons dans un autre monde.

La Thaïlande est un pays paradoxal, économiquement métamorphosée par le tourisme de masse en l’espace de deux petites décennies, elle semble s’être fortement occidentalisée sans pour autant y perdre son âme : les thaïlandais sont restés accueillants, curieux de l’autre, ouverts.
Célia et moi avons passé la frontière quelques heures avant Chloé et Vincent, qui nous ont rejoints plus tard à la Happy Inn, un hôtel de zone industrielle, choisi uniquement parce que juste en face de la gare routière. Au final, nous ne prendrons même pas le bus, préférant faire du stop.

En trois pick-up, nous sommes arrivés au Thaksin Maharat National park, qui abrite le plus grand arbre de Thaïlande. Nous avons laissé nos sacs aux gardiens à l’entrée et nous sommes partis voir le fameux chêne tropical quelques kilomètres plus loin.

Cet arbre est le plus haut de Thaïlande (58m) et il a 700 ans.

Vincent, avec un genou enflé et perclus de courbatures, souvenir des marches birmanes qui conduisaient au monastère  de Zwegabin, a quelque peu souffert de cette petite randonnée. Comme la journée est bien avancée, nous décidons finalement de camper sur place : encore faut-il retourner chercher nos sacs…
Chloé et Vincent dorment dans leurs hamacs. Célia et moi dans une moustiquaire. Nous n’avons plus notre tente depuis le Népal. Grâce au truchement de DHL, elle nous attend en Nouvelle-Zélande…

Célia, malade, passe une très mauvaise nuit.

Le lendemain, nous partons en stop pour Sukhothai. Un pick-up s’arrête rapidement. Le chauffeur tient à ce que je monte avec lui à l’avant tandis que mes trois compagnons prennent place sur la plateforme arrière. S’en suit un dialogue de sourd assez comique et, malgré Google Trad, nous ne parvenons pas à nous comprendre. Non loin de Sukhothai, à un checkpoint, notre chauffeur entre en discussion avec un policier masqué (Coronavirus oblige), lequel nous explique que notre chauffeur ne va pas jusqu’à Sukhothai mais qu’il se charge de nous trouver un nouveau véhicule. Trente seconde plus tard, c’est chose faite : le policier a « réquisitionné » un pick-up antique qui nous dépose tout près de notre Guesthouse.

A Sukhothai, nous visiterons le parc qui abrite les ruines de vieux temples où trônent de vastes bouddhas.

Nous observons les oiseaux qui ont pris possession des pièces d’eau

Le lendemain, Chloé et Vincent partent d’un côté de la Thaïlande et nous de l’autre…

Deux mois passés en compagnie de ma fille. Magique!


Nous voilà repartis en stop, mais il faut d’abord marcher longtemps pour sortir de la ville. Nous attendons à peine quatre minutes avant qu’un pick-up ne s’arrête pour nous conduire 60 kilomètres plus loin, à Phitsanulok, où nous prenons un bus qui nous dépose devant l’entrée du Thung Salaeng National park.

Le prix d’entrée pour les foreigner est dix fois plus cher que pour les locaux. Célia parvient à attendrir la guichetière qui nous laisse entrer au tarif enfant. Le camp site est à trois kilomètres mais une voiture s’arrête en chemin pour nous épargner les deux derniers. Nous campons au bord d’une rivière.

Cette fois-ci, on monte le tarp aussi.
On mange de la soupe achetée en Inde
Entrelacements

Le lendemain, aucune voiture ne passe, si bien que nous regagnons la sortie à pied. Un pick-up s’arrête qui nous conduit jusqu’à la route de Loei. Là, nous sommes pris en charge par un couple de Thaïlandais qui insistent pour que nous prenions un bus dans la ville voisine. Ils sont tellement gentils que nous nous laissons faire. Au final, le bus ne va pas jusqu’à Loei. Nous sommes contraints de prendre un taxi partagé puis un songthaew (camion à bancs) jusqu’à Chiang Khan au bord du Mékong.

Chiang Khan

Chiang Khan est une ville de villégiature essentiellement fréquentée par des touristes chinois. Nous découvrons que les prix y sont plus élevés que dans le reste du pays. Mais des chinois, il n’y en a point, consignés qu’ils sont par leur gouvernement à cause du Coronavirus. La Thaïlande en souffre déjà : le nombre de touristes a baissé de 43%. Si l’épidémie se poursuit, le pays pourrait perdre 1,5 point de croissance et subir des pertes de 250 milliards de bahts de revenus touristiques (plus de 7 milliards d’euros). Le tourisme thaïlandais est très fortement dépendant de son voisin chinois : sur les quelques 40 millions de touristes reçus l’an dernier, près de 11 millions venaient de Chine.
De fait, Chiang Khan ressemble à une station balnéaire normande au milieu de l’automne, avec ses hôtels et ses restaurants déserts.

Nous nous promenons tranquillement au bord du Mékong avant de repartir en stop encore.

Le kitsch thaïlandais n’a rien à envier au birman!

Pas facile le stop quand aucune voiture ne passe…

Nous voilà à Sangkhom en 4 pick-up et une voiture. Dans ce dernier véhicule, nous rencontrons Jean-Baptiste, français et auto-stoppeur lui aussi. Il « travaille dans la sécurité » (j’en déduis qu’il doit être vigile) et a pris un mois et demi de congé sans solde. Il est cultivé mais maladroit, avec des idées très arrêtées et un peu collant, mais baste, ce sont les aleas des rencontres.

Une mascotte provisoire trouvée au milieu de la route

A Sangkhom, tandis que nous faisons du stop, une dame en scooter se présente à nous comme la chef de district (maire) et nous propose de nous accompagner en voiture jusqu’à Si Chiang Mai où nous pourrons prendre le bus. Elle nous demande de l’attendre tandis qu’elle retourne à son bureau chercher une voiture avec, croyons-nous comprendre, un chauffeur. En fait, elle a réquisitionné une voiture municipale pour nous, avec deux employés municipaux à l’intérieur ! Plus tard, tandis que nous arrivons  à destination, elle rappelle ses subordonnés pour leur dire qu’à cette heure il n’y a plus de bus et qu’il faut donc nous conduire jusqu’à Nong Khai. En tout 85 kilomètres d’abus de biens publics…

Nous nous installons dans une Guesthouse au bord du Mékong. Le lendemain, nous partons en vélo visiter le Sala Kaeo Kou bouddha park, un parc de sculptures géantes, oeuvre du mystique  Luang Pu Bunleua Sulilat (1932-1996), un exilé laotien, sorte de facteur Cheval asiatique qui a synthétisé bouddhisme et hindouisme. L’ensemble est assez délirant!

Fin du premier épisode thaïlandais. Le lendemain, nous partons à la frontière cambodgienne rejoindre mon frère Christian…