Septembre en Islande

Septembre nous surprend par sa violence. L’Islande, soudain, est devenue une gravure romantique. Ciel noir, vent sifflant, brouillard et pluie. Les premières neiges tombent le 4. La nature se déchaîne, les alertes météo se multiplient. On annonce des rafales à 125km/h… Pas simple lorsque l’on vit dehors, dans une tente de toit qui claque comme une voile.
Alors nous louvoyons, tirant des bordées pour éviter les déluges, passant du nord à l’ouest, de l’ouest au nord, du nord au sud, du sud au sud-ouest, à l’affût de la moindre trouée solaire, de la moindre accalmie, des moindres heures sans vent. Nous y parvenons parfois, prenant de vitesse les perturbations en passant par les pistes des Highlands, celles qui franchissent allègrement les gués, des pistes pleines de trous et de bosses, de flaques et de cahots ; des pistes qui tutoient les glaciers, qui traversent des champs de lave, des chaos de scories noires, des landes sans fin, des assemblées de lacs et des entrelacs de fleuves et de rivières…

Hvammstangi

Le 1er et le 2, nous sommes au nord-ouest, sur la péninsule de Vatnsnes pour la seconde fois de notre séjour, juste pour le plaisir d’aller revoir les phoques.

Une alerte vent violent et neige nous force à fuir le lendemain dans une des rares zones épargnées par la tempête : la péninsule de Snaefellsnes.

Le mont Kirkjufell
Le mont Kirkjufell

Là, nous tentons de voir le Snaefellsjökull mais monsieur le glacier reste obstinément voilé. En revanche, nous avons la chance de contempler le mont Kirkjufell sous le soleil, alors que nous l’avions vu dans les brumes en juin.

Le 4, nous vivouaquons dans le champ de lave de Berserkjahraun. Nous l’avions repéré au tout début de notre séjour : c’est une zone de camping sauvage fréquentée par les Islandais. Il n’y a personne.

Célia ramasse des myrtilles et bleuets et nous explorons les lieux : les rochers de lave ont d’étranges formes, ce sont des trolls qui se sont laissés surprendre par les premières lueurs du jour et qui sont restés à jamais figés.

Le 5, nous foulons les glaces du Langjökull, étincelant sous le soleil, le temps de constater une nouvelle fois à quel point les glaciers se retirent.

Les pistes que nous suivons longent aussi l’Eyriksjökull et traversent des paysages infinis. Nous nous amusons à traverser les flaques à fond de train. Nous couvrons plus de 150 km de pistes pour rejoindre Vatnsnes à nouveau, poursuivis que nous sommes par le mauvais temps.

Nous repartons le 8 pour refaire la piste F35 sur laquelle nous étions tombés panne en 2016. Nous ne la reconnaissons pas tellement elle est tout belle et proprette maintenant.
Le 9, nous tentons de voir le Ok (oque) qui il n’y a pas si longtemps (2019) s’appelait le Okjökull. Mais le glacier (jökull en islandais) a fondu. Il ne reste plus que le Ok, c’est-à-dire un volcan aux flancs réduits en poudre par la glace.

Le Ok dans les brumes

Le Ok cache sa triste nudité derrière un voile de brume. Nous y retournons le lendemain, mais une nouvelle fois il se refuse à nos regards.

Poème: les glaciers morts.

Le 18 août 2019, une plaque commémorative bilingue, en islandais et en anglais à été apposée sur le Ok. Son texte est une lettre écrite par l’écrivain Andri Snær Magnason, intitulée « Bréf til framtíðarinnar »:
« Ok est le premier glacier islandais à perdre son statut de glacier. Dans les 200 prochaines années, tous les glaciers du pays devraient suivre le même chemin. Ce monument vise à reconnaître que nous savons ce qui se passe et ce qui doit être fait. Vous serez les seuls à savoir si on l’a fait. »

Nous squattons la salle commune d’un camping, le temps de cuisiner un peu, risotto et gâteaux aux pommes.

Nous rencontrons Paul et Madelon, un couple de hollandais en Voyager T6 Volkswagen qui nous trouve bien courageux de traverser l’Islande avec une tente de toit. Lorsque nous leur expliquons que nous avons voyagé 11 mois avec un simple sac-à-dos, Paul, qui parle un français parfait, trouve que c’est du « vagabondage primitif ». La formule est délicieuse et nous allons la faire nôtre !


Le 11 septembre, nous prenons la route pour Akranes, dans l’idée de nous baigner une nouvelle fois dans des sources chaudes, mais elles sont fermées à cause de la Covid. Du coup, nous poussons jusqu’à Grindavik où nous nous installons pour plusieurs jours au camping, lequel dispose d’une salle commune. Là, nous rencontrons pas mal de voyageurs, Keat et Delphine, un couple franco-cambodgien de photographes parti pour un an mais dont le départ a été retardé par la crise sanitaire ; Jean-Yves, un ex-éducateur spécialisé qui a tout plaqué pour s’installer comme guide en Islande, et Emma, une française, voyageuse au long cours. Nous passons beaucoup de temps à discuter avec eux. Jean-Yves a déjà fait le tour de l’Islande en vélo en hiver et projette une traversée hivernale nord-sud par les pistes, voire même une traversée est-ouest (ce qui constituerait une première mondiale).

Le blog vélo de Jean-Yves: Islande à vélo

L’agence de Jean-Yves: Passion Islande

Voyez aussi les fabuleuses photos de Keat et Delphine.

Nous explorons la merveilleuse péninsule de Reykjanes, généralement délaissée par les touristes (et c’est un tort!). Les pistes traversent des paysages très variés: champs de lave, volcans, sources chaudes, chaudrons de sorcière…

Source chaude

Grâce à Jean-Yves, nous voyons notre seule et unique aurore boréale.

Ainsi s’arrête notre voyage en Islande…

Une réflexion sur « Septembre en Islande »

  1. Bonjour les amis
    Merci pour les photos et les textes passionnants.
    Et maintenant ?
    Un climat plus clément, si possible pas de Corona ( je parle du virus ) et de la Corona pour toi Celia ?
    C est pas gagné !
    Bises à vous deux

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