Bilans et balivernes
J’ai passé presque deux ans à choisir le matériel que nous allions emporter. Je ne peux pas prétendre n’avoir fait que des bons choix, mais je n’en ai pas fait de très mauvais.
La première chose que je puis dire, c’est que rien de ce que l’on trouve sur le marché n’est fait pour être utilisé de manière intensive. Rien n’est fait pour vraiment durer. L’obsolescence programmée règne sans partage, même pour le matériel technique hors de prix, lequel est plus fait pour être utilisé ponctuellement que sur une longue durée.
Commençons par une chose essentielle, les chaussures. En 2019, nous sommes allés au Vieux Campeur à Lyon et j’ai dit: « Voilà, nous allons partir au moins deux ans, nous allons beaucoup marcher, sur les chemins de randonnée ou sur l’asphalte, en ville, en montagne, dans le désert, etc., nous voudrions des chaussures polyvalentes capables de tenir le coup. » Le vendeur a été très clair: « Ah mais, nous a-t-il dit, ce genre de chaussures n’existe pas! » Tout ce qu’il pouvait nous proposer, c’étaient des chaussures Meindl ressemelables, en cuir doublé de Goretex, qu’il faudrait imperméabiliser régulièrement avec une crème et qui avaient l’inconvénient (mais au final, ce n’en était pas vraiment un, notamment par 50° en Iran!) de ne pas être chaudes, ce qui signifiait prévoir de grosses chaussettes…
Ceux qui ont des Meindl pour randonner vous diront qu’ils les ont parfois depuis 10 ans sans problème. Oui, mais ils ne les utilisent que quelques jours par an…
Les nôtres, c’est une autre histoire: nous les portons au quotidien… Je ne sais combien de kilomètres elles ont parcourus au juste. Beaucoup!
Ce sont les miennes qui ont le plus souffert, peut-être parce que je suis plus lourd, et mon sac aussi; peut-être aussi parce que je traîne des pieds, ou parce que je donne des coups dans les cailloux comme un sale gosse, allez savoir! J’aurais dû faire réparer une couture au Népal, je ne l’ai pas fait et les choses ont dégénéré sur le talon droit. Quant aux semelles, les photos parlent d’elles-mêmes.
Les pare-pierres de nos chaussures ont beaucoup souffert aussi, notamment en Islande, créant des points vulnérables où l’eau peut pénétrer. Lors de notre retour en France en septembre 2020, j’ai déposé mes chaussures à Romans chez un spécialiste pour ressemelage. Cela n’a hélas pas été suffisant. Mes chaussures ne sont plus étanches, je n’ai pas tardé à m’en rendre compte au Chili: la rosée du matin de certains chemins a suffi. Je me suis assez vite retrouvé avec des chaussettes mouillées… Les chaussures de Célia ont suivi: désormais elles non plus ne sont plus totalement étanches.
Au Chili encore, nous avons vite compris que nos duvets avaient eux aussi fait leur temps. Ce sont des Millet. Nous les avons depuis 2016. Ils ont affronté des températures négatives en Islande, au Kirghizstan et au Népal…
La garniture en plume d’oie a fini par perdre son gonflant et donc de son pouvoir calorifique. Nous avons eu froid sur une randonnée peu exigeante alors que la température était positive (8 degrés).
Par chance, nous avons aussi un sac à viande en Thermolite et des sous-vêtements en Mérinos qui permettent de compenser, mais il va falloir hélas très sérieusement penser à racheter des duvets.
Notre tente, une Vaude Taurus UL2 est un atout contre le froid, elle a affronté sans broncher le vent islandais, la neige et la grêle Kirghizes. Ce n’est qu’une 3 saisons mais elle a toutes les qualités d’une 4 saisons tout en étant très légère (moins de 2 kg). Je la recommande sans restriction, si ce n’est qu’elle n’est pas adaptée aux grands gabarits dans sa version deux places.
Dans les zones arides où tropicales, nous avons aussi utilisé un tarp Sea to Summit qui se monte avec des bâtons de marche, couplable avec une moustiquaire (bien utile en Asie du Sud-est).
Je serai plus circonspect en ce qui concerne les matelas. Après avoir longuement utilisé des matelas autogonflants, nous avons finalement opté pour des matelas pneumatiques de la marque Nemo, isolants (-8), légers, peu bruyants et très confortables. Nous avons eu quelques soucis avec eux à Hormuz, à cause d’épineux cachés sous le sable, mais là je n’ai rien à redire, n’importe quel matelas aurait crevé, et nous avons du reste pu réparer sans soucis. Non, c’est la valve (extérieure) qui pose problème. Au bout d’un certain nombre d’utilisations (pas si élevé que ça), le mécanisme qui repose sur un « pousser-tourner » ne fonctionne plus. En Islande, j’ai dû fabriquer une muselière avec un collier métallique et des élastiques au beau milieu d’une longue randonnée pour empêcher le matelas de se dégonfler.
Toujours durant notre retour automnal, j’ai fait marcher la garantie (à vie) et le magasin en ligne où j’avais acheté les matelas s’est montré irréprochable, je le recommande vivement aussi bien pour la qualité des conseils que pour le sérieux, la réactivité et les prix (rayonrando.com). Nemo a dû prendre conscience du problème inhérent à ses valves externes puisque la marque a changé de système. Le matelas que nous avons eu en échange se gonfle 5 fois plus vite et la valve semble plus fiable. Le problème, c’est que l’autre matelas dont nous disposons encore avec l’ancien système a lui aussi rendu l’âme sur une randonnée chilienne… Mais là encore, Rayon Rando s’est montré irréprochable.
Au rayon confort, nous avons depuis 2016 des petits matelas Multimat pliables d’une trentaine de cm (surnommés « Trucs-à-cul »), très utiles pour s’assoir sur sol dur ou mouillé. Ils ont affronté tous les terrains. Malheureusement, le vent de Patagonie m’a arraché le mien et l’a relâché au beau milieu de la lagune au pied des Torres del Paine… Adieu!
Nous utilisons aussi une « pocket blanket » en Cordura Matador, étanche, léger qui peut indifféremment servir de nappe de pique-nique, de serviette de plage, de tarp, de bâche pour les sacs, etc.
Le réchaud.
Randonner (et voyager) avec un réchaud à gaz est une absurdité: les cartouches ont une durée de vie très limitée et ne sont pas recyclables. En Islande par exemple, nous avons vu des containers où s’entassaient plusieurs mètres cubes de cartouches vides. C’est une hérésie!
Aussi avons-nous opté pour un réchaud multicombustible (Optimus), très cher à l’achat, mais qui ne produit d’autre pollution que la combustion du carburant. Qui plus est, on peut trouver de l’essence absolument partout, ce qui n’est pas le cas des cartouches de gaz, du reste fort chères en comparaison de l’essence. L’utilisation de ce type de réchaud est un peu délicate mais sans réel danger.
A noter pour l’ami Erwan que la première pièce que nous avons eue à changer sur est le tampon de la pompe (changement au bout de 18 mois) qu’il convient de graisser (silicone). Mieux vaut partir avec un kit de réparation (en vente sur le site de la marque).
Nous avons néanmoins un bec de gaz ultralight (40 g) que nous avons utilisé en intérieur dans les refuges ou salles communes de camping islandais où les randonneurs occasionnels abandonnaient gracieusement leurs cartouches de gaz entamées. Préférez les systèmes à vis parce que les cartouches de type Camping-GAZ ne se trouvent guère qu’en Europe, et encore…
Popotes, couverts et petite poêle en Titane. Rien à redire: léger, efficace, solide.
La filtration de l’eau: nous avons utilisé un filtre Sawyer, très efficace et conçu pour durer des années.
A partir de l’Inde, nous avons aussi eu des gourdes WaterToGo. Malheureusement, les bouchons ont rapidement cessé d’être étanches, nous les avons changés. Les deux ont fini par casser, l’un en Islande, l’autre au Chili. Une des gourdes a aussi fini par avoir une fuite.
WaterToGo France nous a certes offert une gourde neuve, mais cela ne suffit pas à nous donner envie de conseiller cette marque: le système est très pratique, les filtres efficaces quoique limités à 3 mois ou 200 litres, mais la gourde en elle-même est une méchante camelote.
Les bâtons de marche
Nous avons choisi des bâtons Fizan 4 brins extrêmement légers (chez rayonrando.com encore) et peu encombrants. Le système de serrage par viroles est parfois capricieux mais compte tenu de ce que nous leur avons fait subir, nous n’avons vraiment rien à redire.
Les sacs-à-dos. Nous avons des Grégory Paragon dont le poids à vide a été un élément de choix déterminant. Le sac de Célia présentait un défaut de fabrication (sangle manquante dans l’armature du dos) très gênant que nous avons remarqué trop tard, au Kirghizstan. J’ai remplacé la pièce par un élastique. La réparation tient depuis 23 mois. Nos sacs ont affronté tous les terrains, tous les temps et tous les climats (de moins 10 degrés à plus 50), les soutes et les coffres, les trains, les bus (dont les pires: les bus indiens), les taxis collectifs, les rickshaws, les bateaux, les bennes et même une niveleuse; les sursacs étanches ont été réparés x fois, nous n’avons jamais pris l’eau. Seules les poches extérieures élastiques ont un peu souffert mais restent opérationnelles. Ce sont des sacs très confortables, notamment au niveau du dos, même chargés à bloc). A noter que nous avons compensé l’absence de poches internes par des sacs étanches permettant de séparer le matériel. C’est plutôt un bon choix.
Nous disposons aussi de petits sacs à dos en cordura Sea to summit qui se plient dans un sac de la taille d’un poing, bien utiles en ville, pour les petites randonnées et comme bagage à main dans les avions. Ils ont supporté les pires traitements, nous les avons rafistolés, ils tiendront encore.
Le Goretex.
Nous avons une veste Goretex Salewa et un surpantalon Berghaus. Ce sont deux éléments indispensables, incontournables. Ils nous ont sauvé la mise bien des fois. Sans eux, nous aurions été trempés jusqu’aux os à plusieurs reprises. L’effet coupe-vent est aussi absolument magique. La membrane de la veste a souffert mais reste encore efficace.
Le mérinos (sous-vêtements, tee-shirts, tour de cou, bonnet et sous-gants) Indispensable en première couche: antibactérien, inodore même après plusieurs jours de randonnée intensive, c’est la matière à privilégier pour les voyageurs au long cours. Quoique fort onéreuse, la marque Icebreaker est vraiment la meilleure. Seul bémol: les lavages à la main finissent par déformer ce type de vêtements…
Les chaussettes Monet, en mérinos aussi, se sont avérées très efficaces et résistantes.
Autres vêtements.
Nous avions chacun un pantalon léger de randonnée Décathlon. Nous les avons changés au bout de 15 mois d’usage intensif (ils étaient presque devenus transparents)
Pour le Chili, nous avons acheté des pantalons softshell Cimalp, chauds et imperméables, à voir sur la durée, mais les autres articles de cette marque française que nous avons (pantalon-short antimoustique et polaire chaude) se sont montrés solides et efficaces. Ils ont été très utiles en Patagonie, contre le vent et la pluie.
Doudoune: nous avons chacun une Montain hardwear Ghost whisperer en plumes, très chère, très légère et compactable, mais aussi remarquablement efficace compte tenu de son poids.
Nous sommes adeptes du multicouche, ce qui ne nécessite pas d’avoir une doudoune épaisse.
Les trucs à avoir:
Un rouleau de Duck Tape et du Siem Grip: avec ça, on peu presque tout réparer, notamment les sacs, sursacs, matelas et tentes. Des élastiques des serre-clips…
En conclusion? Il va falloir renouveler une partie de notre matériel!